vendredi 12 novembre 2010

Un aller simple, de Didier Van Cauwelaert



" J'ai commencé dans la vie comme enfant trouvé par erreur. Volé avec la voiture en fait. J'étais garé sur les clous et, pendant les années qui ont suivi, Mamita, quand je ne finissais pas mon assiette, disait que la fourrière allait venir me chercher. Alors je mangeais trop vite, et après je rendais tout, mais dans un sens c'était mieux ; ça m'évitait de prendre du poids. J'étais l'adopté, je restais à ma place."


J'avais gardé de ce livre un souvenir ému, et c'est non sans appréhension que j'ai entamé sa relecture il y a peu.
Les aventures d'Aziz, trouvé bébé dans une voiture et plus ou moins recueilli chez des gitans marseillais allait-elle me faire autant rire ? Sa rencontre avec Jean-Pierre, un attaché humanitaire dépressif chargé de le ramener dans son pays d'origine dans le cadre d'une politique anti-immigration allait-elle autant me toucher ?
Impression mitigée.
On se délecte des premières pages, celles retraçant la jeunesse d'Aziz, ses après-midis d'amour dans les calanques de Marseille, ses vols d'autoradio dans les quartiers de Marseille Nord, l'Atlas dans lequel il se plonge avec délice pour étudier les légendes du monde. Le narrateur est ce anti-héros atypique, qui nous régale de sa verve naïve et enfantine, cruelle sans le vouloir, doucement ironique.
Puis tout bascule. Une toute nouvelle politique d'immigration est lancée en grande pompe devant les médias du pays : on souhaite ramener les étrangers dans leur pays, et les aider à s'y réintégrer, sous l'oeil bienveillant des caméras. Manque de chance, cela tombe sur Aziz, le plus français et gitan des arabes, qui a le malheur d'avoir en poche des faux papiers qui le disent marocains, lui dont la patrie est Marseille, ville qu'il aime d'amour... On lui colle un attaché humanitaire, Jean-Pierre, col blanc qui ne digère pas sa récente rupture avec Clémentine, et qui a pour mission de l'emmener au Maroc.
A partir de là, les deux hommes partent en quête de l'Atlas, prétexte à un voyage initiatique qui sonne faux.

Un aller simple soulève la question de l'identité, celle que l'on se construit et celle que l'on nous colle comme une étiquette. Et sur ce point, aucune déception, le livre est bien fidèle à mon souvenir : poignant, sensible, vrai. L'auteur sait parfaitement restituer des sentiments délicats comme la culpabilité, la honte, l'incertitude. Malheureusement, à cette deuxième lecture (près de dix ans après la première) le livre me parait moins exaltant, plus facile, peut-être pas assez abouti, un peu court en somme.
Reste que le sujet est d'une modernité étonnante, le thème de la peur de l'autre et de l'étranger soulève d'amers relents d'identité nationale.

Un aller simple, de Didier Van Cauwelaert, 1994

1 commentaire:

  1. C'est toujours intéressant de relire car nos impressions évoluent et sont rarement les mêmes. J'aimerais avoir plus de temps pour le faire mais ma PAL de livres encore non lus et tellement énorme. Je n'ai encore jamais lu Didier Van Cauweleart, j'en lis pas mal de bien mais j'ai toujours l'impression que ses intrigues sont un peu "tape-à-l'oeil"...

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