lundi 28 décembre 2009

Faire l'amour, de Jean-Philippe Toussaint



"C'est l'histoire d'une rupture amoureuse, une nuit, à Tokyo. C'est la nuit où nous avons fait l'amour ensemble pour la dernière fois. Mais combien de fois avons-nous fait l'amour ensemble pour la dernière fois ? Je ne sais pas, souvent."


Comment se détache-t-on de la personne aimée lorsque l'amour ne suffit plus ? Comment quitte-t-on le corps qui nous fait jouir alors qu'il nous est aussi familier que notre propre corps ?

Avec son écriture crue et froide Jean-Philippe Toussaint nous donne des pistes de réponse, sans concession mais avec une poésie mordante, profonde, violente.
Faire l'amour, c'est l'histoire du narrateur qui aime Marie, mais qui ne peut plus l'aimer. Il se retrouve avec elle à Tokyo, là où ils feront l'amour pour la dernière fois, dans la suite d'un hôtel de luxe. C'est donc l'histoire d'une rupture, avec tout ce qu'elle comporte de logiquement douloureux, mais aussi d'absurde et de poétique.
Le théâtre de leur dernière nuit est parfaitement décrit, Tokyo la ville résolument contemporaine, presque inhumaine mais vivante, organique, haute et froide. Elle est à la fois menaçante et enveloppante. Dans sa certitude elle est une alternative à la relation qui s'effiloche et qui fait mal.
Tokyo c'est également les tremblements de terre, qui terrifient, menacent les êtres et les rapprochent. Jean-Philippe Toussaint joue avec ces symboles : pluie, neige, terre instable, les éléments s'accordent pour refroidir, endormir, aviver et dramatiser cette dernière nuit d'amour
Toute l'histoire est éclairée par la lumière froide d'un néon, avec une précision mécanique, que l'on retrouve dans l'utilisation de répétitions à bon escient, qui nous permettent de comprendre l'incertitude et les errances du narrateur, sa dureté et ses pulsions (de départ, de mort, de destructions, de sexe).
Il y a là aussi des moments de pure beauté, un regard sur l'autre, sur soi, sur la disparition et le repli absolument bouleversants.

Faire l'amour, Jean-Philippe Toussaint, ed de Minuit, 2002