mercredi 13 janvier 2010

L'étrange histoire de Benjamin Button, de Francis Scott Fitzgerald




"Mr Button suivit des yeux le doigt pointé, et voici ce qu'il vit. Enroulé dans une volumineuse couverture blanche, et partiellement enfoncé dans l'un des berceaux, un homme âgé de quelque soixante-dix ans se tenait assis. Ses cheveux rares étaient presque blancs et une longue barbe grise lui pendait au menton, agitée d'une ondulation absurde par la brise qui venait de la fenêtre "


L'idée de départ est de celles tellement évidentes qu'on se demande pourquoi personne ne l'a exploitée plus tôt.
Et si l'on naissait sous la forme d'un vieillard de 70 ans pour tout au long de notre vie "rajeunir"? Finir notre vie en toute beauté, dans la fraîcheur de nos vingt ans, avec l'expérience et la sagesse du temps passé...
Francis Scott Fitzgerald s'attaque avec une fausse légèreté mais une vraie ironie à ce sujet, en nous racontant l'étrange destin de Benjamin Button.
Lorsque Benjamin naît, il a les traits d'un vieillard ridé et barbu, au cheveu manquant, et est plus intéressé par un bon cigare que part un biberon de lait chaud. Stupeur et scandale dans la famille bourgeoise de Baltimore dont il est issu. Sur les quelques cinquante pages de la nouvelle, on va voir évoluer ce personnage hors du commun, qui est confronté à l'incompréhension, aux moqueries et à la cruauté du monde face à la différence.

Fitzgerald traite la question avec un style presque désinvolte, loin du mélodrame de l'adaptation cinématographique de David Fincher. On a cependant du mal à s'attacher aux personnages, trop superficiellement brossés, sans réelle profondeur ni relief. Benjamin lui-même peut être parfois détestable, imbu de lui même, en particulier lorsque son corps retrouve fougue et séduction. Mais il est difficile de lui en faire des reproches...

L'histoire reste fascinante, soulevant une réflexion intéressante sur la mémoire, les souvenirs, et ce qui construit notre identité.
Les réactions provoquées par la situation plus qu'étrange de Benjamin Button ne sont pas sans ironie et burlesque : les membres de sa famille plongés en pleine incompréhension face à sa différence, usent tour à tour de méchanceté, du déni, ou encore reprochent à Benjamin de ne rien faire pour enrayer l'absurdité de son rajeunissement. Une attitude cruellement amusante qui rappelle l'absurdité de l'homme face à la différence

Cette nouvelle est issue du recueil Les enfants du Jazz.

L'étrange histoire de Benjamin Button, de Francis Scott Fitzgerald, ed Folio, 1922

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